vendredi 17 avril 2009

Pur de Lars Norén

L'auteur dramatique suédois Lars Norén connaît une notoriété en irrésistible ascension. Il explore deux veines, la peinture d'une humanité dont la misère psychique et matérielle est de moins en moins marginale et celles de couples à la dérive où il apparaît fait du même bois que Strindberg et, plus prés de nous, qu'Ingmar Bergman. Pur, qu'il met lui-même en scène et où il se fait le spéléologues de nos abîmes intimes appartient à cette dernière catégorie. 
Dans l'espace confiné d'un appartement deux couples aux destins froissés se croisent. L'un quitte les lieux où il vécut de nombreuses années, l'autre y emménage. Très vite les temps se confondent. Peut être s'agit-il des mêmes personnes à une vingtaines d'années de distance. Ce qui est sûr est que tous deux ont perdu un fils et que cet intolérable passé les tire par la manche. Si les hommes parviennent à ne manifester que fugitivement  que  cette épreuve les a fait dépérir, les deux femmes ne cachent pas leur instabilité mentale.  Lorsque celle qui se sent aux abords de la vieillesse, tente de dire à la plus jeune que le temps viendra où la lumière réapparaîtra, celle-ci lui rétorque qu'elle n'a aucun désir d'aller mieux. 
Lars Norén atteint ici la plénitude de son originalité tant sur le plan de l'écriture que de la mise en scène  alors que celle de "A la mémoire d'Anna Politkovska" à laquelle il s'attella il y a quelque mois n'était guère convaincante. Comme pétrifiés les comédiens balancent un texte d'une densité intimidante. Il faut dire que l'interprétation mérite un coup de chapeau collectif. Catherine Sauval (trop rarement distribuée), Christian Cloarec, Alexandre Pavloff et Françoise Gillard acceptent notre finitude avec autant de douloureuse élégance que les créatures imaginées par Bergman. 
La dernière image réalisée en vidéo (qui pour une fois n'apparaît pas comme un gadget) est d'une puissance si tétanisante que plutôt que d'applaudir ce spectacle qui porte  haut l'exigence artistique on a envie de s'éclipser sur la pointe des pieds.
Jusqu'au 17 mai Théâtre du Vieux-Colombier   
       

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