Vitalie Rimbaud portait un nom qui lui convenait à merveille. Figure maternelle majuscule, la mère d'Arthur était une paysanne ardennaise à la vitalité furieuse. Xavier Grall (1930 - 1981), auteur de la pièce radiophonique mise en scène par Jean-Noël Dahan, la surprend au soir de sa vie alors que vieille femme au corps déformé par la sciatique elle se laisse envahir par ses souvenirs. Ecrit d'une plume rutilante ce déchiffrage obsessionnel du passé prend à la gorge.
Assise sur un fauteuil, le pied gauche posé dans une bassine d'eau puis marchant en s'appuyant sur une canne, Vitalie fulmine, en veut à ces "pommadés" parisiens qui ne veulent voir en son fils qu'un génie illuminé alors qu'elle réprouve la vie de dévergondage (c'est son mot) qu'il mena avec Verlaine. Lequel elle voue évidement aux gémonies. Elle préfère voir en Arthur le négociant avisé qu'il fut dans la dernière partie de sa courte vie.
Elle se remémore pourtant que dès son plus jeune âge il "fallait qu'il fiche son camp". Elle en a dit des neuvaines pour qu'il revienne... Mais lorsqu'il finit par le faire il était "souillé de pied en cape". Les certitudes de cette femme saturée de moralisme et de religion - qui s'est toujours considérée comme un roc au milieu d'une mer en furie - par instants vacillent. Ne seraient-ce pas sa sécheresse de coeur et son autorité tatillonne qui ont fait fuir son fils?
Il a rarement été dit avec une telle justesse combien le passé des morts pèse sur la tête des vivants et combien il rendent confus nos propres sentiments. Martine Vandeville joue cette apocalypse intime avec la belle âpreté des vraies tragédiennes. Qu'elle ne soit pas davantage sollicitée est un mystère.
Jusqu'au 21 avril Théâtre du Lucernaire tel 01 45 48 91 10
jeudi 8 mars 2012
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