En 1985, six ans après la fin du règne des Khmer rouges qui avaient livrés le Cambodge à la désolation, la metteuse en scène et citoyenne du monde Ariane Mnouchkine proposa à Hélène Cixous d'écrire une pièce sur le roi Sihanouk qui avait été témoin ou acteur de toutes les secousses qu'avait connu son pays. Portée par la flamme de son sujet, elle écrivit un texte qui vingt- cinq plus tard a gardé toute sa puissance. Ce fut à la création Georges Bigot qui incarna le souverain khmer. Il cosigne aujourd'hui avec Delphine Cottu un spectacle joué par une troupe de comédiens cambodgiens. Le rôle de Sihanouk est tenu par San Marady, une femme haute comme trois pommes, au jeu tout en nerfs et à la présence époustouflante et par moments hilarante. Elle est entourée de vingt- cinq comédiens (qui interprètent une soixantaine de rôles!) et de quatre musiciens, tous âgés d'une vingtaine d'années qui n'ont donc pas connu les temps génocidaires, n'ont pas éprouvé leurs terreurs.
On croise au cours de ce spectacle au long cours applaudi à tout rompre nombre de personnages avec qui Sihanouk eût à se colleté et qui ont laissé une place - parfois désastreuse dans l'Histoire - tels que Kissinger, Zhou Enlaï, les maîtres du Kremlin et évidement Pol Pot et sa bande de canailles qui optèrent pour la politique de la terre brûlée et soumirent Sihanouk à des contraintes scélérates. Des apparitions spectrales viennent, elles apporter du réconfort à ceux qui ne savent plus que faire ou sont parvenus au dernier stade du désespoir.
Aujourd'hui le Cambodge semble sorti d'affaire. Les derniers compagnons de Pol Pot passent en jugement. Mais c'est oublier que les grandes puissances se sont jetés sur la manne pétrolière qui fait la richesse du pays, lequel se trouve une fois de plus saccagé. Ce que ne voient évidement pas les touristes venus admirer les splendeurs d'Angkor.
Jusqu'au 26 octobre Théâtre du Soleil tel 01 43 74 24 08
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