mardi 28 septembre 2010

La loi du marcheur (entretien avec Serge Daney

On connaît surtout le comédien Nicolas Bouchaud grâce à la virtuosité de son jeu dans les spectacles de Jean - François Sivadier. S'appuyant sur "Itinéraire d'un ciné-fils", l'entretien que Serge Daney accorda à Régis Debray,, il change radicalement de registre. Sous la baguette d'Eric Didry il devient Daney, cinéphile et critique dont la pensée en fusion reste une référence majeure aux yeux de tous ceux pour qui le cinéma n'est pas mort.

Il commence par évoquer son enfance dans la France appauvrie et disqualifiée d'après-guerre. Le cinéma, que, emmené par sa mère, il fréquente dès ses jeunes années, lui offre ses premiers émerveillements. Il se souvient avec amusement que les films français avaient à l'époque pour vedettes les très réactionnaires Pierre Fresnay et Jean Gabin. Difficile pour un môme de s'identifier à ces monstres sacrés déjà plus de première jeunesse. Il leur préfère -qui s'en étonnera?, -les américains James Stewart ou Cary Grant. Un drap blanc occupe le fond de la scène. Y sont projetés notamment des extraits de Rio bravo d'Howard Hawks, qui restera son film-culte.

Plus tard il se remémore avec une douce auto-dérision le voyage qu'il entrepris avec son ami Louis Skoreki à Hollywood afin d'y rencontrer ces génies à leurs yeux qu'étaient évidement Howard Hawks mais aussi Leo McCarey et bien d'autres. Comme ils écrivaient pour Les Cahiers du cinéma, revue déjà prestigieuse, toutes les portes s'ouvrirent devant eux qui, se prenant très au sérieux, posaient à leurs interlocuteurs des questions qui les laissaient perplexes...

Quelques années encore et il est engagé à Libération où, veilleur inquiet de son temps, il commence à trouver, comme il en fit le constat, "critique l'état du cinéma". Il y dénonce déjà la main mise de la télévision et son langage codé qu'il appelle très justement une évangile. Il déplore aussi le retour de manivelle conservateur. Que dirait-il de la France sans illusions de ce début du 3e millénaire?

Le seul regret que nous laisse cet inclassable monologue porté par la prestation d'une remarquable vivacité de Nicolas Bouchaud est qu'on n'y entende pas la voix de Serge Daney si révélatrice de son exceptionnelle intelligence. Atteint du sida Il nous a quitté en 1992.

Jusqu'au 16 octobre Dans le cadre du Festival d'Automne Théâtre du Rond Point tel 01 44 95 98 21

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