dimanche 16 novembre 2008

Mettre en scène

Comme toujours la sélection de Festival de Rennes initiée par François Le Pillouër est copieuse. Nous n'avons, et c'est navrant , pu découvrir que trois spectacles sur la quantité de ceux qui sont programmés du 11 au 22 décembre.  Très attendue La vénus à la fourrure d'après Leopold von Sacher- Masoch n'a pas comblé notre attente. D'autant que le précédent  spectacle de Christine Letailleur "La philosophie dans le boudoir" tiré de l'oeuvre de Sade était d'une grâce irradiante. La  metteuse en scène, qui  a manifestement un faible  pour les textes qui prennent la forme de réflexions sur nos abîmes intérieurs,  décrit ici comment un homme a découvert le plaisir  après avoir  subi au cours de son adolescence  une expérience masochiste. Il arrive (sans trop de peine) à corrompre l'imagination de Wanda, une  femme qu'il a séduit. Il lui demande  de l'engager comme esclave et la pousse à se revêtir d'une fourrure quand elle en fait son consentant souffre- douleur.  Fanatisé par sa passion pour les traitements infamants qu'elle lui inflige, il ne pourra jamais avoir avec elle des relations plus ordinaires. Christine Letailleur a eu la fâcheuse idée de verser dans la surenchère esthétique. La moindre des attitudes Valérie Lang est d'une sophistication appuyée, ce qui ne peut que faire enrager ceux qui ont vu le film de Christophe Honoré, La belle personne,  où elle jouait avec un naturel exquis une prof éprise d'un jeune collègue.  (du 21 janvier au 15 février Théâtre de la Colline)

Autre spectacle qui fut l'objet de controverses : La petite pièce en haut de l'escalier de Carole Frechette auquel s'est coltiné Blandine Savetier. L'auteure qui aime flirter avec le fantastique décrit une jeune femme qui vient d'épouser le propriétaire d'une maison au nombre de pièces impressionnant. Seul l'accès de l'une d'entre elle lui est interdit. D'abord étourdie par le vertige qu'apporte une soudaine richesse, la jeune femme n'aura bientôt d'autre obsession que de pénétrer dans la chambre qui doit rester close. On songe évidement à Barbe bleue. Mais la dramaturge a pris l'initiative d'user de nombreuses disjonctions narratives, ce qui rend ce texte, qui pourrait avoir été écrit  en des temps reculés, étrangement prenant. On comprend toutefois qu'une  portion de public soit resté insensible à cet univers proche de celui d'un conte. 

Mais le clou de cette bribe de festival auquel nous avons pu assister est Edouard II de Christopher Marlowe qu'a choisi de monter Cédric Gourmelon. (et qu'il a traduit avec André Markowicz) Follement épris de Glaveston, son mignon, le roi le couvre de faveurs ce qui lui vaut l'hostilité des nobles du royaume. Plus qu'une pièce sur l'homosexualité, Edouard devient le récit de la  passion dévorante que le roi, malgré le pouvoir dont il est investi, payera au prix le plus fort.  Une scénographie austère est régulièrement contrebalancée par des bouffées baroque que n'aurait pas désavoué un cinéaste comme Werner Schroeter dont l'oeuvre est nourrie d'artifices aussi somptueux  qu' audacieux (on pense notamment à ce moment ou l'aimé apparaît enrobé d'une musique qui en dit long  sur les sentiments qu'éprouve pour lui le souverain). Cédric Gourmelon possede avec Vincent Dissez qui interpete le roi une carte maîtresse. Sa présence effrénée, son acharnement à évoquer à tout bout de champs son bien aimé, les patins qu'il lui roulent devant la cour réunie (et sa femme rejetée)  et les rires maladifs dont il est pris à l'annonce de l'exécution de ses ennemis génèrent une tension  qui a sur le reste de la troupe un effet galvanisant. S'il est un spectacle qui aura provoque durant ce week end un onde choc, c'est celui-là. (les 2 et 3 dec l'hippodrome, scène nationale de Douai, les 12 et 1" dec Théâtre Brétigny sur Orges, du 5 au 31 janvier Paris- Villette

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