vendredi 8 janvier 2010

Sous l'oeil d'Oedipe

On connaît la flamboyance verbale de Joël Jouanneau. Elle est ici, dans cette reconstitution transfigurée de la fin de la légende d'Oedipe et des choix extrêmes auxquels sont confrontés les deux jeunes hommes et les deux filles dont il est à la fois le frère et le procréateur, enrichie par des bouts de phrases empruntés à Pierre Michon, Léopardi, Yannis Ritsos et, je dirais, surtout Edmond Jabès tant sa pensée et ses mots élargissent nos horizons.

C'est donc un pièce saturée de références que joue Jacques Bonnaffé (Oedipe qui nie les racines mortifères de la tragédie en cours). Si après avoir consulté des figures du destin, il se considère innocent de la guerre fratricide qui oppose Polynice et Etéocle jadis si proches qui aujourd'hui veulent tous deux rêgner sur Thèbes, leurs deux soeurs, Antigone et Ismène, ne veulent pas les voir s'entre-tuer.Si la première est dominée par le fol amour qu'elle porte à Polynice, sa cadette fait preuve d'une lucidité perçante. Mais les deux rivaux, bien qu'au printemps de leur vie, sont incapables d'entendre raison. Ils formulent leur désaccord avec une violence volcanique. On sait que leur entêtement leur coûtera à tous deux la vie et qu'Antigone défiant les lois malfaisantes de la cité creusera une tombe pour son frère adoré, ce qui lui vaudra d'être exécutée.


Comédien étranger à tout jeu conventionnel, Jacques Bonnaffé incarne un Oedipe qui se sait irresponsable de la malédiction dont lui et les siens sont victimes. Il a trouvé en Philippe Demarle, Eric Zeff et Hédi Tillette de Clermond-Tonnerre des partenaires de choix. On regrette d'autant plus que le décor soit loin d'être une réussite et les costumes d'une rare laideur. Ce qui est surprenant de la part de Patrice Cauchetier d'ordinaire si bien inspiré.

Jusqu'au 28 janvier Théâtre de la Commune Aubervilliers tel 01 48 33 16 16

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