samedi 30 janvier 2010

Rencontre avec Loïc Corbery, pensionnaire au Français

Ce qui frappe de prime abord chez Loïc Corbery, 34 ans au compteur, devenu depuis le 1er janvier sociétaire de la Comédie Française où il est entré en 2004, est son air épanoui. Lequel rassure les metteurs en scène qui furent toujours nombreux à l'engager sans se douter qu'il est, comme la plupart des comédiens que leur métier passionne, dévoré par un feu intérieur. Ce qui n'a pas échappé à Jacques Lassalle qu'il eut comme professeur au conservatoire et sous la direction de qui il joua moultes fois notamment des personnages susceptibles de partir en vrille.

"On dit à propos de Lassalle les choses les plus contradictoires. Il est vrai qu'il peut se mettre dans des états de douleur extrêmes qui contaminent les acteurs. Mais avec le temps il assume de plus en plus cet aspect épidermique parfois violent au travail. Il a de plus une pensée si pertinente qu'il arrive à creuser toujours davantage le propos de Figaro divorce que nous jouons depuis trois saisons. Mon grand regret est qu'il n'arrive pas à trouver les moyens pour monter "Loin de Corpus Christie" de Christophe Pellet, un auteur considérable qui jouit en Allemagne et en Angleterre d'une énorme considération mais reste ignoré en France. J'étais de la mise en espace qu'il en a fait et ai pu constater à quel point cette pièce était faite pour lui"


Natif d'Avignon, où, enfant, il allait dans la cour d'honneur, alors ouverte, à tous jouer à cache et, plus tard, déclamer des poèmes, Loïc Corbery a eu très jeune l'occasion d'assister à des spectacles. " J'avais 7 ou 8 ans quand ma mère nous a emmené mon frère et moi voir Le Mahabaratah mis en scène par Peter Brook. Je n'en garde pas d'images précises mais des sensations fortes. Je me suis réellement éveillé au théâtre vers 14 ans à cause d'une fille qui faisait partie de la compagnie Le tremplin que je me suis empressé de rejoindre. Mes éducations sentimentales et théâtrales se sont faites de concert. Quelques années plus tard j'ai eu l'occasion de voir La danse du diable de Philippe Caubère. Cette représentation à décidée de mon avenir. Alors que Je pensais vaguement faire des études commerciales, j'ai su ce soir là que je serais acteur. Mes parents qui m'avaient déjà vus sur les planches m'ont dit que j'y semblait si heureux qu'il fallait que je poursuive dans cette voie. Après le conservatoire où j'ai entre autre mis en scène Peter Pan - qui avant d'être un roman était une pièce écrite par James Mathew Barry à partir d'histoire qu'il inventait pour les enfants de ses voisins, enfants avec lesquels il avait des rapports plutôt nauséabonds - j'ai eu la chance de beaucoup naviguer à vue dans le métier sous la direction entre autres de Stuart Seide et de Jean-Pierre Miquel.

Ceux qui rentrent trop tôt au Français, par exemple en sortant du conservatoire ou d'une autre école, ont le sentiment d'avoir raté quelque chose. C'est pourquoi des jeunes aussi talentueux que Marina Hands, Mathieu Genêt ou Audrey Bonnet qui semble toucher du doigts les anges et tant d'autres en sont partis. Mais après avoir comme moi connu l'errance, rentrer dans cette maison, où pourtant toutes les aventures ne sont pas heureuses, est salutaire. Je travaille à présent parfois pour le cinéma ou la télévision. Aller de temps en temps voir ailleurs ressource et revenir dans la maison réchauffe."

Comme les autres comédiens engagés au Français que nous avons rencontrés, Loïc Corbery le défend bec et ongles. Lorsqu'on lui fait remarquer qu'avec le départ de Catherine Hiegel, Pierre Vial et Michel Robin, la maison de Molière apparaît de plus en plus comme un repaire de jeunes, il fait remarquer qu'il est de fait important de mélanger les générations et que Muriel Mayette, l'administratrice, s'y emploie en allant régulièrement puiser dans ce vivier de talents qu'est la troupe des sociétaires honoraires. Comme parler de théâtre visiblement l'exalte, je lui demande s'il est d'autres arts ou activités qui ont suscités en lui autant d'emballement. "Pendant longtemps je pratiquais l'escrime car j'adorais les films de cape et d'épée. Fanfan la Tulipe reste mon film de chevet. J'ai aussi adoré jouer du violon. J'avais une prof fabuleuse. Quand elle a disparue j'ai tenté de continuer avec d'autres. Mais ce ne fut pas concluant. J'ai laissé mon violon dans un coin. Quand il m'arrive de vouloir le reprendre, instrument exigent, il se venge d'avoir été délaissé. Une fille que j'aimais était, elle, une excellente violoniste. J'ai donc pendant quelque temps voulu devenir luthier afin de pouvoir prendre soin de son violon". Décrit par certains comme doué d'une nature romantique, il admet que Musset trouve en lui beaucoup d'échos. Tout comme Maeterlinck dont il aime l'onirisme et le mystère et Ibsen qui ne peut que séduire ceux qui se reconnaissent dans ses personnages aux secrets tourments.

Une dernière question concerne ses engagements politiques. "Contrairement à la génération précédente qui vivait dans un monde en ébullition, les trentenaires, dont je suis, ont longtemps vécu dans un climat d'insouciance. Mais les années passant nous sommes de plus en plus inquiets de voir le corset qu'on noue autour de la France et conscients qu'il serait indécent de traverser la vie avec des oeillères. Ce qui me donne un peu d'espoir est de constater que les test ADN voulus par le gouvernement ou le renvoi dans leur pays d'afghans qui y risquent leur vie provoquent des explosions de paroles indignées.


Le voilà à présent prêt à s'attaquer avec voracité aux Oiseaux d'Aristophane auquel se mesurera Alfredo Garcia. Ce sera ensuite La critique de l'école des femmes, première mise en scène de Clément Hervieu-Léger qu'il appelle "mon frère de scène"

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Interview intéressante, parce que la menière dont Loïc Corbery parle de lui et de son métier est toujours personnelle et attachante. Il est toutefois regrettable que cet article soit rempli de très grosses fautes d'orthographe et mal ponctué.