De nombreuses années durant, Michel Didym fut, notamment, au festival de Pont à Mousson dont il est le principal fondateur, un découvreur de textes de théâtre issus des divers coins du monde. Son défaut majeur est que, esprit pressé, ces textes, il les mettait en place ou en scène sans guère en approfondir le contenu. Ce qui, aujourd'hui, n'est plus le cas. Il s'affronte cette fois à la première pièce de Jonas Hassen Khemri, jeune auteur dramatique né d'une mère suédoise et d'un père immigré tunisien. Et en tire un spectacle aussi déjanté que propre à foutre les foies.
Après un démarrage fébrile dont on vous laisse la surprise quatre comédiens qui interprètent seize personnages s'accrochent au nom d'Abulkasem qui cristallise toutes les peurs, malentendus et préjugés de notre époque aussi bien que de celles qui l'ont précédée. Les changements accélérés du capitalisme mondial et ses funestes conséquences n'ont fait qu'amplifier le besoin d'un bouc émissaire. Le nom d'Abulkasem qui peut faire songer à celui d'Ousama Ben Laden lui convient on ne peut mieux. Totalement déstructurée, la pièce échappe à toutes définitions étriquées. D'autant qu'elle est traversée de fulgurances loufoques et que son intrigue flottante en dit long sur l'absence de points de repère qui caractérisent notre époque.
Enfin de mettre l'accent sur les mensonges qui entravent les relations entre les différentes communautés, l'auteur a eu l'idée ô combien ingénieuse de faire interviewer un sans papier d'origine perse par une traductrice qui fait croire qu'il tient non seulement des propos belliqueux et racistes mais ne rêve que d'occire le maximum de juifs. La force de cette oeuvre protubérante - mais pas longue pour autant - qui dénonce une politique où l'étranger est porteur de tous les maux est qu'à l'exception de la scène qu'on vient de décrire, elle provoque presque constamment le rire.
Michel Didym l'a non seulement montée avec une irrésistible fantaisie, il a aussi choisi avec Quentin Baillot, Luc- Antoine Diquéro et Léna Bréban (qui remplace le temps de quelques représentations Julie Pilod) des comédiens capables de tous les excès. Dommage cependant qu'il n'ait pas préféré pour incarner l'un des personnages un acteur d'origine turque, iranienne ou maghrébinne, ce qui aurait donné davantage d'authenticité à cette Invasion. On ne peut en revanche que le féliciter pour la présence sur une montagne de journaux de deux musiciens aussi talentueux que Flavien Gaudon et Philippe Thibault
Jusqu'au 17 avril Théâtre Nanterre Amandier tel 01 46 14 70 00
lundi 29 mars 2010
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