Une fois n'est pas coutume : la nomination de Macha Makeïeff à la tête du Théâtre de La Criée de Marseille est on ne peut plus justifiée. Cette metteuse en scène a , en effet un culot qui manque à la plupart de ses pairs. A preuve ces réjouissantes Mamelles de Tirésias où avant de faire entendre l'oeuvre que Francis Poulenc, inspiré par le poème de Guillaume Apollinaire, mit en musique, elle fait débuter le spectacle par un Foxtrot peu emballant de Chostakovitch et par Le boeuf sur le toit, une merveille signée Darius Milhaud.
Si le texte d'Apolinaire est -on l'avait pour la plupart oublié - prodigieux avec son appel à toutes les combinaisons sexuelles possibles (les changements de sexe sont glorifiés!), et la conscience aigüe, puisque la Grande Boucherie se profile qui saignera le pays de ses forces vives, qu'il faut faire des enfants... Makeïef a opté pour un style endiablé. Elle nous projette dans un cirque à Zanzibar avec une troupe nombreuse où l'on croise une sosie de Josephine Baker (qui faute de donner naissance à des enfants en adopta en quantité) des acrobates qui arborent leurs muscles, des femmes aux rondeurs affolantes, un cheval espiègle, des bouffons lunaires, des travestis et une faunes d'olibrius. Tout ce petit monde joue avec une énergie drôlatique. On songe à Fellini et en particulier à son film Les clowns.
Des chanteurs d'élite complètent le tableau. La seule réserve que nous inspire ce superbe fourbi est que le tragique en soit évacué. Comme la période qu'évoque Appolinaire (celle de la Grande Guerre) comme celle où Poulenc compose son oeuvre (1945) sont des temps de ténèbres, on ne peut que regretter que celle qui tient avec tant de talent le gouvernail n'ait pas mélangé le tragique au trépidant. Dernière réserve que l'on fera sur cette représentation d'un niveau par ailleurs exceptionnel est la multiplication parfois inutiles de trouvailles visuelles. L'écran sur lequel sont projetés des images de guerre est devenu dans le théâtre actuel un cliché. Si l'on pointe ces quelques restrictions c'est évidement parce que cette création est d'une telle force qu'on la rêverais sans l'ombre d'un défaut.
Jusqu'au 21 janvier Opéra Comique tel O8 25 01 01 23 jeune public : 01 42 44 45 76
samedi 8 janvier 2011
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1 commentaire:
Le contexte local marseillais vous importe peu, mais deux précisions:
- Marseille ne prend pas de "s"
- La Criée est avec un "e"
Pour le reste, faire le lien entre votre goût pour cette pièce et la nomination de Madame Macha, propulsée par l'Elysée, est une très grande paresse.
Pascal Bély.
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