mardi 11 janvier 2011

Identité de Gérard Watkins

A ses débuts dans la mise en scène l'acteur Gérard Watkins écrivait avec la passion d'un néophyte d'amples fresques d'un faste verbal parfois épuisant. Il a aujourd'hui changé de style. Identité, sa dernière création, n'est jouée que par deux acteurs : Fabien Orcier et Anne-Lise Heimburger qui étaient déjà de ses précédents spectacles. Comme le firent autrefois Lars Von Trier et consorts en inventant la théorie du dogme, Gérard Watkins s'est imposé de rigoureuses contraintes. Unité de lieu. Pas d'entrée ni de sortie des personnages. Quasi aucun élément de décor. Une seule source de lumière. Pas de noirs entre les scènes.

Digne fils de son père, le réalisateur britannique Peter Watkins (à qui l'on doit notamment ces somptueux brûlots que sont La Bombe, Punishment park et Edward Munch, la danse de la vie), il est bien décidé à dénoncer au lance flamme un monde toujours plus favorable aux nantis. Ses deux personnages sont des déclasssés. Elle a pris le parti de faire la grève de la faim, tandis que lui s'accroche à une chimère.

Ayant découvert sur une bouteille de vinasse qu'ils peuvent empocher de l'argent en répondant à une question, il ne songe qu'à tenter sa chance. Etant par ailleurs tous deux d'une impérieuse lucidité, ils dissèquent, en s'empoignant régulièrement, les temps abjects qu'on vit. Indignés par l'amendement qui rend légal les recherches sur l'ADN imposés à certains étrangers, le metteur en scène rappelle par la voix de sa comédienne les lois raciales édictées en 1940 sous Pétain. Etaient considérés comme juifs ceux qui avaient trois grands parents qui étaient de cette origine ou seulement deux si leur conjoint appartenait à la "race" honnie. Impossible de ne pas tracer de parallèles troublants avec notre époque d'autant que Sarkozy a depuis la création de la pièce eu l'infamie de mettre les Roms au ban de la société

Ce gros plan d'un couple représentatif de notre époque tantôt fait sourire, tantôt noue les tripes tant la mise en scène tient fermement le cap.

Jusqu'au 11 février Théâtre de la Bastille tel 01 43 57 42 14.

Aucun commentaire: