Auteure réputée pour son indépendance d'inspiration et son écriture à la puissance mélodieuse, Sylvie Germain passa quelque six ans à Prague. Elle y croisa à plusieurs reprises une géante claudicante et disgracieuse qui manifestement ne se souciait pas le moins du monde de sa mise. Le temps passant la narratrice fait la découverte que la passante n'est pas faite de chair et de sang mais de larmes. Celle-ci n'a pas de visage et porte ainsi le poids de tous ceux dont la condition fut sans espoir. Au premier chef les victimes du Judéocide.
C'est ainsi qu'elle évoque les enfants assassiné de Terezin, un père qui dessinait sur le mur de leur misérable logis des fleurs afin que sa petite fille ait, avant de partir en fumée, un reflet de la beauté du monde et le doux Bruno Schulz, écrivain et peintre d'une incomparable ferveur qui fut abattu d'une balle dans le dos par un officier nazi. La mémoire en crue, l'auteure revoit aussi son propre père cloué par la maladie qui l'emportera
Alors qu'elle semblait avoir disparu la créature d'outre - monde resurgit sous la forme d'une colosse informe. La passante est l'exact contraire du Golem, colosse lui aussi mais fait d'argile auquel donna vie un rabbin, chimiste et philosophe afin qu'il protège la communauté juive de Prague. Car en poursuivant son chemin abrupt et en traversant les murs, la narratrice rappelle l'anéantissement de cette communauté. Elle finit par disparaître de ces rues au charme lugubre sans doute pour aller frayer avec les vivants et les morts d'autres régions du monde touchée par le malheur.
Claire Ruppli qui a choisi d'interpréter ce texte le fait à la manière d'une mélopée. Une prestation qui remue les coeurs.
Jusqu'au 9 octobre Les déchargeurs tel 08 92 70 12 28
jeudi 19 août 2010
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