Superbe idée que d'ouvrir ce festival qui met, cette année, en valeur les lettres des écrivains russes par la fin de TolstoÏ, l'un des plus considérables d'entre eux. A 80 ans, après avoir partagé pendant prés d'un demi siècle sa vie avec Sophie qui lui donna une dizaine d'enfants, il dételle. Fais comme les acteurs un peu cabot une sortie remarquée. On assistera ensuite, via des missives du grand homme et des extraits du journal tenu par sa femme, à la vie de ce couple en perpétuelle désintégration. La surprise est que Sophie n'a rien d'un esprit borné, comme le faisait sous entendre le génie avec lequel elle partagea sa vie. Elle fut en revanche l'exemple même de la femme rompue. Il suffit de lire Anna Karénine pour apprendre en quel piète estime il tenait la gente féminine.
Leurs relations furent pourtant au départ enivrées de passion. Mais l'arrivée d'une nombreuse progéniture et le deuil irrémédiable de Sophie à la disparition prématurée de trois de leurs fils ruinèrent leurs liens. Il fait ajouter à ces événements que le pessimisme de Tolstoï s'exaspéra lors de leur installation voulue par sa femme à Moscou. Responsable de la mise en espace, Ladislas Chollat a réalisé un travail d'orfèvre, saisissant avec un égal discernement l'aspiration à la sainteté et le peu de cas qu'il faisait des siens le géant de la littérature que les abîmes intimes de son épouse. La proximité artistique de ces comédiens d'élite que sont Michel Aumont et Josiane Stoleru est, l'on s'en doute, pour beaucoup dans l'immense plaisir que le public prit à ce dialogue de sourd.
Autre lecture qui aura marqué les esprits :celle que fait sous la direction subtile de Richard Brunel, Norah Krieff de "vivre-écrire-vivre" adapté par Véronique Olmi de textes de Marina Tsvetaeva, poète discrètement majeure qui passa une partie de sa vie à Prague, une autre dans la région parisienne avant de revenir à Moscou et de connaître le mauvais sort fait aux artistes par Staline puis de mettre fin à ses jours. Lorsqu'elle écrit les lignes qui ont été si admirablement lues la vie lui est un enchantement. Elle s'est établie en Tchecoslovaquie et vit, comme elle le fera à maintes reprises, un amour fou. On imagine sans peine que l'objet de cet amour prit la poudre d'escampette...
Anne Rotenberg, qui assure avec ardeur et réserve la direction artistique du festival, a porté son choix sur d'autres grands irradiés des mots tels que Maïakovski, Ossip Mandelstram, Tourgueniev dont des textes, auxquels notamment Muriel Mayette, Samuel Labarthe, Xavier Gallais et Sabine Haudepin prêtent leur souffle et leur voix, ont été donnés à entendre.
L'année prochaine le festival tournera autour de lettres écrites par des philosophes. Comme c'est la même initiatrice de ce festival qui les choisira il y a de grandes chances qu'll soit d'une qualité égale à celui si dense de 2011
Festival de la correspondance du 6 au 10 juillet tel 04 75 46 55 83
mardi 12 juillet 2011
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