vendredi 24 janvier 2020

Angels in America de Tony Kushner

Arnaud Desplechin n'a jamais oublié l'éblouissement où l'avait plongé il y a prés d'un quart de siècle  la mise en scène conçue par Brigitte Jacques-Wajman de la pièce de Tony Kushner "Angels in America. Il prend  aujourd'hui le parti de la monter à son tour. Que cette oeuvre soit ancrée dans son époque, celle qu'on surnomma les années sida, ne lui  est pas apparu comme  un obstacle. Elle a  pourtant à l'évidence pris de l'âge. C'est la seule réserve que  procure le spectacle qu'il a élaboré avec un talent aussi affirmé que celui avec lesquels il réalise ses films. L'auteur dramatique tresse le parcours de plusieurs personnages à la personnalité puissante mais au destin altéré pour certains par la maladie, pour d'autres par une éducation néfaste.  Parmi ces derniers Joe et sa femme Harper tous deux élevés dans la religion mormone. Si elle se gave d'anxiolytiques, lui s'efforce d'ignorer ses préférences sexuelles. Joe subit l'emprise de Roy Cohn, un avocat qui fricote avec les pires canailles, est à la fois juif et antisémite, homosexuel et homophobe et enfin républicain d'un anti-communisme si virulent qu'il se targue d'avoir largement contribué à envoyé Ethel Rosenberg à la chaise électrique. Il apparaîtra que cette mère de deux jeunes garçons  n'est pas sans lui rappeler sa propre génitrice. Lorsqu'il ne fait plus de doutes qu'il est atteint du virus mortel,  il a des hallucinations qui se matérialisent. Celle qu'il a fait exécuter n'a de cesse de venir le railler. Il étanche ses fureurs en s'en prenant à Belize, son infirmier noir qui, lorsqu'il quitte 'hôpital,  joue avec délectation les folles. Une des caractéristique de la pièce est que le plateau est le lieu de deux actions qui se déroulent simultanément.  Alors qu'on suit les parcours des personnages déjà cités, Louis détaché de la tradition juive de sa famille quitte Prior, son amant, quand il ne fait plus de doutes que celui-ci  est, lui aussi, atteint par le VIH.  Ecoeuré par sa propre attitude, il  tente de s'envoyer en l'air avec des inconnus.  Tandis que son ex lui dit combien son mal le fait souffrir, il doit se contenter de lui parler de ses bleus à l'âme. Cette pièce monstre, comme l'écrit  l'administrateur du Français dans le dossier de presse bénéficie non seulement du talent hors pair de Michel Villermoz et de Dominique Blanc qui godille  tout du long d'un personnage à l'autre mais aussi  de celui de leurs jeunes partenaires. Jennifer Decker, Christophe Montenez, Jérémy Lopez et Gaël Kamilindi. Ils apportent la preuve que de nombreux  comédiens entrés à la Comédie Française ces dernières années sont de la même force
 que leurs glorieux aînés.  Si l'on ajoute que les incursions surréelles des anges annoncées par le titre de la pièce lui permet d'atténuer sa noirceur et que la scénographie de Rudy Sabounghi est d'un insolite bienvenu on aura saisi que ce spectacle devrait faire un tabac. En alternance jusqu'au 27 mars Comédie-Française Richelieu tél 01 44 58 15 15


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