mardi 3 novembre 2015

L'Aquarium a 50 ans et toutes ses dents

Pour célébrer dignement les 50 ans de la création de la troupe de l'Aquarium, François Rancillac - actuel directeur du lieu dont les autorités prétendument compétentes ont décidé de ne pas renouveler le contrat - fait jouer par un groupe d'élèves comédiens (en formation à l'ESAD)nombre d'épisodes qui retracent le parcours hasardeux de ce collectif. Nourri par les souvenirs de ceux qui furent de l'aventure (Jacques Nichet, Didier Bezace, Jean-Louis Benoit, Karen Rencurel, Martine Bertrand, Alain Macé, Philippe Marioge, Thierry Bosc, Bernard Faivre, Louis Merino, Joceline Lion Henri Gruvman, Geneviève Yeuillaz ...) le spectacle subjugue. Comme l'ont fait de nombreuses créations de ces garçons et filles qui avaient une vingtaines d'années en 68. Ces productions réalisées avec des moyens financiers dérisoires étaient au début le fruit d'improvisations. Et des actes citoyens. "Marchands de villes" vit, par exemple, le jour pour dénoncer les menées des promoteurs immobiliers qui, soutenus par les banques, rasaient des quartiers de Paris, en chassaient les habitants et construisaient des immeubles pour une population nantie. Il fallut, pour inventer ce théâtre sociologique et politique, où l'humour était fréquemment de la partie, déployer des trésors d'ingéniosité et de patience. Une grande partie du temps était consacrée aux assemblées générales où les décisions étaient prises à main levée. Beaucoup se souviennent des tensions guerrières qui traversaient les réunions. Mais aussi de moments poétiques tel celui où Jean-louis Barrault entrouvrit la porte du bâtiment de la Cartoucherie de Vincennes qui allait devenir l'Aquarium, mais où étaient encore entassés les costumes de sa troupe, et voyant répéter les jeunes membres de la compagnie demanda amusé "on fait du théâtre ici?". Plus tard ce furent des auteurs aussi différents que Flaubert, Bove,Camon, Kafka, Feydeau... qui furent mis en scène par Jacques Nichet, Didier Bezace et Jean-Louis Benoit. Puis chacun entama une trajectoire différente. Maître d'oeuvre accompli, François Racillac a su de facétieuse façon rendre compte de cette fourmillante aventure artistique si représentative de la France des années 70 où l'on conjuguait ses forces et croyait ne pas s'en laisser conter. Quelle joie enfin de découvrir des comédiens en herbe qui, avec une énergie sidérante, jouent, changeant continuellement d'identité, ces aînés qui ont inventé un théâtre en rupture avec les conventions de leur époque. Jusqu'au 8 novembre Théâtre de L'Aquarium. Tel 01 43 74 99 61

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