mardi 22 septembre 2015

Père d'August Strindberg Mise en scène Arnaud Desplechin

Pour ce qui est des empoignades conjugales, Strindberg en connaissait visiblement un bout. D'accords sur rien, le Capitaine et Laura, son épouse ne le sont évidement pas sur l'éducation de Bertha, leur fille. Si la mère veut la garder auprès d'elle, le père veut au contraire l'envoyer à la ville afin qu'elle apprenne un métier qui lui permettra, si elle ne se marie pas, de vivre de son travail. Le paradoxe (la pièce en fourmille) est que, par ailleurs, fidèle aux injonctions de son époque, le Capitaine affiche un mépris farouche pour la gent féminine. La pièce - c'est là la finauderie de Strindberg - annonce en fait la fin de l'ère patriarcale. Laura a depuis sa plus tendre enfance, comme le dit son pasteur de frère lors d'une conversation avec le Capitaine, toujours eu le dernier mot. C'est ce qu'elle aura aussi à l'issue d'une guerre des mots qui sans cesse se ravive. Personnalité d'un cran bien trempé, elle usera pour acquérir sa liberté de stratagèmes qui mèneront son mari à la folie. Lorsqu'elle insinue que Bertha n'est peut être pas sa fille, cet homme si sûr de son droit et de son savoir, perd pied. En viendra même à sangloter. Ce que l'on comprend moins- c'est la réserve majeure qu'inspire le spectacle - est la raison pour laquelle le metteur en scène fait à plusieurs reprises pleurer Laura (Anne Kessler). Difficile de ne pas penser à Ingmar Bergman dans les films duquel les femmes, aussi monstrueux que soit leur sort, jamais ne versent une larme. On sait qu'Arnaud Desplechin, l'un des rares cinéastes français à pouvoir mener une carrière d'une superbe exigence, voue une passion au théâtre. Ses films Léo "Dans la compagnie des hommes" d'après le dramaturge anglais Edward Bond et Esther Kahn le prouvent. Il fait ici de convaincants débuts de metteur en scène de théâtre. Lesquels permettent de retrouver le splendide texte français d'Arthur Adamov. L'interprétation par Michel Vuillermoz du Capitaine est, quant à elle, d'une telle force, qu'on peine à trouver pour la définir des mots qui ne soient pas usés. Citons parmi ses partenaires Martine Chevalier qui transforme la vieille gouvernante en un bloc d'humanité inquiète. Jusqu'au 4 janvier Comédie -Française Salle Richelieu tel 01 44 58 15 15

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