Lorsqu'il monte en 1949 Toâ, nouvelle mouture de Florence qu'il créa dix ans plus tôt, Sacha Guitry a perdu de sa superbe. Il n'est plus le séducteur impénitent de ses pièces d'avant-guerre. Bien qu'il n'ait jamais eu maille à partir avec l'occupant et qu'il continua tout au long des années noires à décrire, au théâtre comme au cinéma, des rapports amoureux fluctuants, personne jamais n'apporta la preuve qu'il collabora. Il connaît à présent la solitude de l'artiste et comme il l'a fait durant toute sa carrière il transpose sa vie privée dans ses oeuvres et fait preuve en matière d'état d'âme de plus de sincérité.
Alors qu'il se laisse griser à ses propres propos, il est vrai pétillants d'esprit, dans un salon calqué sur celui de son hôtel particulier, une spectatrice le prend à partie. On apprend bientôt qu'il s'agit d'une de ses anciennes conquêtes. Le voilà bien penaud. Son ex amie finira par monter sur la scène et fera la paix avec celui qui fut, comme on disait, son galant.
C'est merveille de voir Thomas Joly, un très jeune metteur en scène porter son choix sur une pièce d'un homme qu'on considérait comme un parangon de futilité bourgeoise, pire comme un champion du bon mot. Il ne se contente pas de mettre en relief la pièce, sans doute celle à la facture la plus originale des 155 écrites par le maître, mais s'attribue le rôle principal, comme le faisait immanquablement l'auteur du Roman d'un tricheur.
Mais alors que Guitry parlait d'une voix posée et bien articulée, comme il était de mise à l'époque, Thomas Joly et ses acolytes ont adopté le jeu vif en vigueur de nos jours. Toâ apparaît du coup d'une déconcertante modernité
Jusqu'au 17 octobre Théâtre Gérard-Philipe 93 Saint- Denis tel 01 48 13 70 00
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